7 Mars 2006
Source: Les Echos
Dans le feu de l'actualité sanitaire, un événement est passé totalement inaperçu alors qu'il aurait fait couler beaucoup d'encre en d'autres circonstances. Il s'agit de la récente adoption par le gouvernement d'un projet de loi sur la transparence dans le domaine du nucléaire civil. Celui-ci comprend, à titre principal, les centrales électriques d'EDF mais aussi de nombreuses applications industrielles ou médicales. La question de la sécurité de ces installations a toujours été au centre des débats sur la place - importante - du nucléaire dans l'économie française. Depuis l'accident de la centrale soviétique de Tchernobyl, près de Kiev, cette préoccupation a dépassé les milieux écologistes pour toucher l'ensemble de la société. Il est vrai qu'à cette occasion, les autorités françaises avaient été fortement critiquées pour avoir déclaré que le nuage radioactif venant d'Ukraine s'était comme par enchantement arrêté aux frontières de l'Hexagone.
Vingt ans plus tard, le gouvernement tire les premières leçons de ce mensonge d'Etat. Il est, enfin, convaincu que le renouvellement à venir du parc des centrales nucléaires, voire son extension pour faire face au déclin du pétrole, ne seront possibles qu'appuyés sur la confiance des citoyens. Or cette confiance ne peut pas être assurée si les producteurs d'énergie nucléaire et ceux qui contrôlent la sécurité de la production dépendent de la même autorité gouvernementale. Telle est pourtant la situation en France depuis le lancement du programme nucléaire à la fin des années 1950.
A l'inverse, de nombreux pays tels que les Etats-Unis, le Canada ou l'Espagne, ont confié depuis longtemps le rôle de surveillance du nucléaire civil à une autorité indépendante. C'est cette innovation majeure que le gouvernement français vient de décider en créant l'Autorité de sûreté nucléaire. Cette autorité aura notamment pour tâche d'inspecter toutes les installations et, éventuellement, de prendre des sanctions en cas de négligence et d'alerter les pouvoirs publics et l'opinion en cas d'incident. Ainsi seront séparées les fonctions de réglementation qui demeurent de la compétence du gouvernement, de production qui incombent notamment à EDF et de surveillance et d'alerte qui sont confiées à la nouvelle autorité indépendante.